Comment, à la fin du XIXe siècle, à Saint-Pétersbourg, le chorégraphe du “Lac des cygnes” fit entrer le ballet dans la modernité. Sur les pas de Marius Petipa, une sensuelle plongée dans l’art de la danse.
Quand il arrive à Saint-Pétersbourg, à 29 ans, Marius Petipa n’est qu’un obscur danseur qui a fui l’ouest de l’Europe pour échapper à ses dettes. Il est loin d’imaginer que son engagement dans la troupe du ballet impérial russe, alors assez médiocre, va le révéler, quarante ans plus tard, comme l’un des plus grands chorégraphes de l’histoire de la danse. C’est au sein des théâtres Bolchoï Kamenny, puis Mariinsky, dans une capitale encore provinciale où trois productions par an suffisent à combler un public peu exigeant, que ce natif de Marseille va inventer un nouvel art du ballet, au fil d’une soixantaine de créations, entre 1862 (La fille du pharaon) et 1895 (Le lac des cygnes). Comme cet ultime chef-d’œuvre, mais aussi La bayadère, Casse-noisette et La belle au bois dormant, beaucoup d’entre elles restent des classiques représentés sur toutes les scènes du monde. Nonchalant épicurien devenu sur le tard travailleur acharné, doté d’un sens inné du spectacle, Marius Petipa, le bien nommé, donnera le meilleur de lui-même après ses 60 ans, composant pour les corps des danseurs un langage aussi virtuose qu’émouvant, à la mesure des partitions qui l’ont inspiré le plus, celles de Tchaïkovski.
Transmissions
Pour raconter l’étonnant destin de celui qui est devenu, poussé par les circonstances, le père de la danse classique d’aujourd’hui, Denis Sneguirev puise dans une iconographie rare : merveilleuses et exotiques photographies théâtrales d’époque, extrait d’une antique représentation de La fille du pharaon, images de La bayadère, le dernier ballet chorégraphié par Rudolf Noureev, en 1992, à l’Opéra de Paris, et même l’un des premiers dessins animés sur la danse. À New York, Moscou, Milan ou Berlin, il filme aussi le travail des danseurs et chorégraphes qui continuent de faire vivre l’œuvre de Petipa. Une exploration sensuelle de l’art de la danse et de sa transmission par les corps et la mémoire de ses interprètes.